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Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Création - 10 représentations du 2 au 12 octobre 2024 au Théâtre des Martyrs, Bruxelles

Un Ennemi du peuple

Reprise !!! 7 novembre à 20h la Salle Europe, Colmar /// 20 au 23 novembre à 20h au PBA à Charleroi

Détester tout le monde

Reprise ! 5.12.24 à 14h et 20h à la Salle Europe à Colmar

Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Création - 10 représentations du 2 au 12 octobre 2024 au Théâtre des Martyrs, Bruxelles

Un Ennemi du peuple

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Combat de nègre et de chiens

Bernard-Marie Koltès

© Christophe Urbain

Dans un pays d’Afrique de l’Ouest, sur le chantier d’une entreprise française au bord de la fermeture, quatre personnages se retrouvent enfermés dans un huis-clos à ciel ouvert, le temps d’une nuit de violence et de désir. Nourri par le cinéma mais attentif à la rigueur de la langue koltésienne, le jeune metteur en scène Thibaut Wenger et sa compagnie franco-belge Premiers actes proposent un spectacle né des épaisseurs de la nuit, campé entre rêve et cauchemar. Une épopée en forme de tragédie.

Durée 2h10

Avec
Thierry Hellin,
François Ebouele,
Berdine Nusselder,
Fabien Magry

 

Mise en scène
Thibaut Wenger

 

Scénographie
Arnaud Verley

 

Costumes
Claire Schirck

 

Lumières
Matthieu Ferry

 

Sons
Geoffrey Sorgius

 

Musique
Grégoire Letouvet,
Marc-Antoine Perrio

 

Assistant mise en scène
Hugo Favier

 

Administration
Patrice Bonnafoux

 

Production
Premiers actes, compagnie conventionnée par le Ministère de la Culture / DRAC et par la Région Grand Est, en résidence au Nouveau Relax – scène conventionnée de Chaumont. en coproduction avec le Théâtre des Martyrs / La Servante; La Filature – scène nationale, Mulhouse; le Théâtre Varia, Bruxelles ; les TAPS Strasbourg ; le Relais culturel régional de Thann. Avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de la SPEDIDAM et de l’ADAMI.

La Libre Belgique, Marie Baudet

« Un Koltès touffu et séminal. Pour servir l’écriture élégante, poétique et rugueuse de Koltès, Thibaut Wenger a pris le parti de la pénombre, à rebours de l’aveuglant soleil synonyme d’Afrique. (…) La distribution, remarquable, s’y fond avec justesse. Thierry Hellin est un Horn ombrageux, à l’autorité pleine de failles. Fabien Magry donne à Cal une fièvre inquiétante, imprévisible. Berdine Nusselder compose une Léone tantôt ingénue tantôt prête à tout pour convaincre de son attirance l’Alboury sobre, obstiné et fier de François Ebouele. »

L’insensé, Jérémie Majorel. Le 20.07.2019.

Le spectacle tangue sur une ligne de crête entre réalisme et hallucination, maintient une tension sourde, celle des appareils électriques dont le bruit répétitif, grésillant, obsédant, peuple la nuit, jusqu’à l’implosion finale, celle de Leone étant ici particulièrement déchirante, radicale. On ne peut qu’être sensible à la manière dont Thibaut Wenger a réglé les distances physiques entre les acteurs. La distance, ou l’abolition de la distance, vient souvent contredire le dessein avoué des prises de parole. Elle donne une allure de western crépusculaire à certaines scènes, à d’autres celle d’une parade animale. Les gardiens du chantier, c’est nous, le public, auxquels s’adresse Alboury en ouolof pour les rallier à sa cause, ce public qui doit à un moment ou un autre sortir de sa neutralité de son ambivalence, dont on ne sait trop comment interpréter les murmures intermittents, lui qui est invisible, plongé dans le noir.

I/O Gazette, Victor Inisan. Le 16.09.2019.

Thibaut Wenger orchestre une mise en scène impeccable pour qui veut découvrir l’œuvre de Koltès, mêlant un splendide univers lumineux (Matthieu Ferry) et sonore (Geoffrey Sorgius) à une admirable distribution servant très respectueusement le texte (mention spéciale à Fabien Magry, qui domestique à merveille la langue de « Combat de nègre… »). Il exhume habilement la beauté des enjeux dramatiques, esthétiques et politiques de l’œuvre, sans toutefois les sublimer d’une saillante contemporanéité… Voilà une manœuvre pédagogique de bon augure qu’on ne lui reprochera pas pour autant.

Un western métaphysique dans une Afrique rêvée

Koltès disait : cette pièce ne parle pas de l’Afrique, car je ne suis pas un auteur africain. En effet, le sujet n’est pas tant l’Afrique qu’un microcosme européen fermé et confronté à l’inconnu, au mystère, au sacré, dans ce continent des peurs qu’est pour nous l’Afrique.

Nous savons ce que la richesse de notre continent doit au pillage des ressources de ceux qui se noient aujourd’hui dans le tombeau qu’est devenu la méditerranée. Et plus notre sentiment de culpabilité est profond, plus le racisme est fort pour nous couper de ceux qui pourraient nous reprocher de vivre comme des chiens.

Koltès transforme cette culpabilité en personnage, Alboury, cet autre noir qui porte le nom d’un roi, ce frère venu avec entêtement, opiniâtreté, demander une seule chose: le corps de celui qu’on a écrasé, dissimulé, fait disparaître dans un tuyau de merde pour continuer à vivre sans le voir, sans que sa dépouille n’inquiète notre mauvaise conscience.

Cette demande mythologique prend aujourd’hui pour nous un sens immédiat.

La présence énigmatique d’Alboury, par la résistance qu’elle oppose à l’explication rationnelle, agit comme un révélateur, au sens photographique. Elle démultiplie les contradictions de chacun, ouvre une brèche dans les fantasmes des derniers habitants de cette miniature de l’Europe et leur renvoie dans toute sa violence leur ignorance, et leur mépris.

En souterrain, le continent condamné de ‘Combat’ est celui de l’intime et de la métaphore, comme peuvent l’être les territoires de Joseph Conrad que Koltès lisait (Au coeur des ténèbres dont s’inspire Apocalypse now). Les enjeux politiques se noient dans la confusion d’enjeux irrationnels, affectifs, dissimulés, violents et secrets.

Les motifs et l’imagerie puissante et cosmique qui habitent l’écriture sont nourris par la psychanalyse – le chantier à l’arrêt d’un pont sur une rivière de boue, l’OEdipe inversé d’Horn le castré tuant son fils Cal ; et par un terreau dramatique ancien – la demande d’Antigone, le masque de terre sous lequel Léone tente de se révéler, comme dans le théâtre classique où l’on reconnaît un frère sous le masque d’un étranger…

J’y vois aussi Koltès flirter avec le cinéma américain, et j’aime jouer avec le genre.

Les intrigues bourgeoises du chantier « quelque part en Afrique de l’Ouest » me semblent emprunter à un autre lointain ouest, l’occident démiurgique tel qu’il est représenté dans le genre bien connu de l’autre conquête de l’Ouest dont on retrouve ici motifs et personnages : le justicier, l’allemande paumée, le fusil qu’on astique, la véranda et le rocking-chair, le poker…

Des images psychédéliques et pop, les fleurs du bien nommé et incongru bougainvillier, les rêves lacustres des réincarnations multiples de Léone… viennent percuter cet univers, visions sous psychotropes qui appartiennent à un autre ailleurs, peut-être le lac au bord duquel Koltès écrit, quelque part en Amérique latine – on y mange de drôles de champignons qui poussent sous les crottes des chevaux et « on voit le soleil tout noir », dans une forêt baroque pleine d’animaux bizarres « tout droit sortis de Bosch » (BMK, Lettres).

Entretien avec Danièle Vallée, pour la 29e édition du festival Francophonies métissées

Pourquoi monter une oeuvre jouée à de multiples reprises ? selon vous, qu’est-ce qui distingue votre approche? Quelle était l’urgence ?

Je travaille en effet souvent sur le répertoire, sur des monuments. Je crois que j’aime venir en second, chercher à jouer, aujourd’hui, avec quelque chose qui n’est plus, avec l’empreinte intime de cette disparition, avec l’Histoire, celle des hommes, celle du théâtre. Je ne cherche pas vraiment une approche qui se distingue, j’essaye juste de travailler sur les textes et leurs présences, dans une relation de proximité et d’étrangeté qui créé des frictions. Combat est un texte que j’ai promené longtemps avec moi, j’aime son mystère, qui reste entier, son monde, son incandescence - l’impossible fraternité, les tractations impuissantes de ce vieux renard, ce pont mal construit qui s’écroule, cette moiteur, cette peur et ce désir. Koltès joue avec le cinéma, avec le genre, mais l’aventure, l’expérience est fondamentalement théâtrale. Archaïque, elle repose entièrement sur le langage et son impuissance à noyer dans un flot de mots la demande d’Alboury, ce corps, cette dette, cette demande mythologique qui résonne aujourd’hui dans toute sa violence.

Pouvez-vous nous expliquer le choix de vos interprètes ? Une évidence pour vous ? Ainsi que le parti-pris de votre mise en scène qui tangue entre réalisme et hallucination ?

Nous avons régulièrement travaillé avec Fabien et Berdine depuis notre sortie d’école, ils sont en quelque sorte comme les pôles opposés de la géographie de nos spectacles. François et Thierry nous ont rejoint sur cette aventure. Il me semble que ce qui m’intéresse, c’est les mouvements contradictoires, intimes et collectifs, les empêchements. Fabien apporte à Cal fièvre et douceur, l’Horn de Thierry est un drôle de monolithe de faiblesse, Berdine est une Léone animale et perdue, la fierté de l’Alboury de François se brouille dans le désir. L’univers du spectacle navigue en effet entre Lynch et Tavernier. Entre le surréalisme hypnotique d’un autre lointain Ouest de l’occident démiurgique, une Afrique rêvée, fantasmé sous psychotropes dans les ruines maya de Tikal - et le réalisme loufoque, truculent et franchouillard de Coup de torchon, parce qu’il y aussi chez ces cabots quelque chose d’un vaudeville.