News

Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Création - 10 représentations du 2 au 12 octobre 2024 au Théâtre des Martyrs, Bruxelles

Un Ennemi du peuple

Reprise !!! 7 novembre à 20h la Salle Europe, Colmar /// 20 au 23 novembre à 20h au PBA à Charleroi

Détester tout le monde

Reprise ! 5.12.24 à 14h et 20h à la Salle Europe à Colmar

Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Création - 10 représentations du 2 au 12 octobre 2024 au Théâtre des Martyrs, Bruxelles

Un Ennemi du peuple

Reprise !!! 7 novembre à 20h la Salle Europe, Colmar /// 20 au 23 novembre à 20h au PBA à Charleroi

Détester tout le monde

Reprise ! 5.12.24 à 14h et 20h à la Salle Europe à Colmar

Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Création - 10 représentations du 2 au 12 octobre 2024 au Théâtre des Martyrs, Bruxelles

Un Ennemi du peuple

Reprise !!! 7 novembre à 20h la Salle Europe, Colmar /// 20 au 23 novembre à 20h au PBA à Charleroi

Détester tout le monde

Reprise ! 5.12.24 à 14h et 20h à la Salle Europe à Colmar

Pour rien au monde - Michael Kohlhaas

Création - 10 représentations du 2 au 12 octobre 2024 au Théâtre des Martyrs, Bruxelles

Un Ennemi du peuple

Reprise !!! 7 novembre à 20h la Salle Europe, Colmar /// 20 au 23 novembre à 20h au PBA à Charleroi

Détester tout le monde

Reprise ! 5.12.24 à 14h et 20h à la Salle Europe à Colmar

Pan !

Marius von Mayenburg

Commande de traduction à Joséphine de Weck

© Christophe Urbain

Le petit Ralf Pan est un monstre, un enfant insupportable, égoïste, imbu de lui-même. Et il le sait. Il est arrivé pour retourner le monde, le sortir de sa paralysie. Il a de grands projets. Ses parents voient en lui un génie, mais lui voit encore plus loin.

Dramaturge à la Schaubühne, Marius von Mayenburg écrit cette pièce en 2017, juste après l’élection de Donald Trump, et après Erdogan, Poutine, Orban, Kaczynski… comme une réaction allergique à ces leaders machos et à leurs réponses simplistes à des questions complexes. Thibaut Wenger s’empare de cette comédie féroce, présentée pour la première fois en français dans une traduction de Joséphine de Weck, où on tire sans complaisance sur tout ce qui bouge, à commencer par la bien-pensance générale de notre époque.

Durée 2h

Mise en scène
Thibaut Wenger

 

Avec
Léonard Berthet-Rivière,
Nina Blanc,
Pauline Desmet,
Emile Falk-Blin,
Fabien Magry,
Titouan Quittot

 

Lumières
Matthieu Ferry

 

Musique & Son
Grégoire Letouvet,
Geoffrey Sorgius

 

Costumes
Claire Schirck

 

Scénographie
Arnaud Verley

 

Vidéo
Isabelle Nouzha,
Pierre Mallaisé

 

Assistanat à la mise en scène
Médéa Anselin,
Anna Solomin

 

Une création de Premiers Actes, compagnie conventionnée par le Ministère de la Culture / DRAC Grand Est. En coproduction avec le Théâtre Varia, centre dramatique Wallonie-Bruxelles, la Coop asbl et Shelter Prod. Avec le soutien de taxshelter.be, ING et du tax- shelter du gouvernement fédéral belge, de la COCOF – Fonds d’acteurs, de la SPEDIDAM et de la Région Grand Est.

 

La pièce PAN ! de Marius von Mayenburg (traduction de Joséphine de Weck) est représentée par L’ARCHE – agence théâtrale. www.arche-editeur.com/

 

Créé le 13 octobre 2020 au Théâtre au Varia à Bruxelles.

Chronique de Dominique Mussche RTBF

L’irrésistible ascension d’un enfant roi.

Marius von Mayenburg est né à Munich en 1972. Dès les années 90, il écrit ses premières pièces, dont notamment Visage de feu et L’Enfant froid, déjà montées chez nous. Remarqué par le metteur en scène Thomas Ostermaier, il est associé depuis le début du siècle auprestigieux théâtre la Schaubühne à Berlin en tant qu’auteur, dramaturge et traducteur.

Le titre de la pièce, déjà, en dit long sur ce qui vous attend : interjection (“peng !” en allemand) qui claque comme un coup de fusil, elle est aussi le patronyme du jeune héros dont vous allez suivre la naissance et l’irrésistible ascension. Dès le cynique monologue d’ouverture depuis le ventre de sa mère, Ralf Pan (Emile Falk-Blin) se dévoile : narcissique, violent, prêt à tout pour arriver à ses fins, il est le monstre parfait.

Pour inaugurer ses hauts-faits, il n’hésite pas à étrangler sa sœur jumelle avant l’accouchement. Plus tard, il prendra plaisir à terroriser ses congénères à la plaine de jeu, son professeur de violon, sa baby sitter… et ses parents (Léonard Berthet-Rivière et Pauline Desmet). Quant à ceux-ci, ils n’échappent pas aux sarcasmes de l’auteur : bobos gonflés de vanité, persuadés d’avoir mis au monde un génie, ils acceptent tout de leur progéniture. “Nous lui avons inculqué des valeurs chrétiennes et occidentales, je suppose qu’il en reste quelque chose” déclarera la mère menacée par la mitraillette qu’elle vient d’offrir à son fils.

C‘est en 2017, en réaction à l’élection de Donald Trump (et de tous les leaders de son acabit) que Marius von Mayenburg a écrit cette comédie féroce. Mais s’il s’intéresse aux mécanismes mentaux d’un tyran, il décrypte aussi la société qui a favorisé l’éclosion d’un tel phénomène, et flingue à peu près tous ceux qui croisent le chemin de Pan : les monstres assumés, mais aussi ceux qui cachent leurs pulsions inavouables sous le vernis de la bien-pensance et du politiquement correct. Le jeune garçon est en quelque sorte le révélateur qui met à nu les consciences et joue de manière machiavélique avec les faiblesses humaines. A la question de savoir pourquoi il avait choisi de créer un personnage d’enfant, l’auteur a répondu : “Quand quelque chose est impossible, il y a seulement deux catégories d’êtres humains qui répondent ‘je le veux quand même’ : les puissants et les enfants”.

Le plateau est transformé en studio de télé caricatural : panneaux de couleurs criardes, lumières crues. Sa fulgurante ascension, Pan la doit aussi aux médias : déjà présentes pour filmer sa naissance, les caméras ne le quitteront plus - à commencer par les publicités d’aliments pour bébés -, le tout projeté sur écran. Mais il ambitionne davantage : il veut “que ça pète”, “que le monde brûle”. Animée par un producteur sadique et surexcité (Fabien Magry), la pièce se transformera finalement en un gigantesque reality show avec concours de Miss Univers et campagne électorale ! Misogyne, raciste, manipulateur et prodigue en solutions simplistes, notre petit héros a toutes les chances de gagner !

Thibaut Wenger et sa bande jouent à fond le jeu de l’exagération jusqu’à l’absurde. Aux côtés des excellents comédiens déjà mentionnés, Nina Blanc et Titouan Quittot, en virtuoses de la transformation, assument une foule de rôles, des plus sombres aux plus pathétiques, de la baby sitter complaisante à la femme battue exhibée sous les spots. Le metteur en scène orchestre le tout avec brio, ménageant un subtil crescendo jusqu’à l’apothéose finale. Trois ans plus tard, à quelques jours de l’élection présidentielle aux Etats-Unis, ce spectacle nous alerte, dans un énorme éclat de rire, sur les dangers du populisme, déjà bien implanté au cœur de l’Europe, tout en nous renvoyant le miroir de nos bonnes consciences.

Entretien par Aurélia Nocca, Théâtre Varia

Qu’est-ce qui t’a amené à mettre en scène cette pièce de Marius Von Mayenburg ?

Pour ma sortie d’études, j’ai mis en scène l’une de ses pièces, L’Enfant froid, qu’on a joué quelques années ensuite avec beaucoup de plaisir. Après avoir monté plusieurs classiques, j’avais envie de revenir à son écriture, qui me permet de travailler avec les acteurs sur un jeu à la fois direct, très concret et tout à fait délirant. Ici, il a d’abord fallu traduire le texte, ce qui m’a permis de l’approcher autrement. C’est une machine à jouer brillante et énigmatique…

Que raconte la pièce ?

On suit le parcours de Ralf Pan, un enfant roi surprotégé, fils unique d’une famille de bobos-bios. La pièce débute avant sa naissance et suit son irrésistible et fulgurante ascension jusqu’à ce qu’il prenne le pouvoir sur le théâtre même et transforme le spectacle en un reality-show du plus mauvais goût, raciste et misogyne, entre campagne présidentielle et concours de miss univers. Le spectacle est une sorte d’improbable genèse télévisuelle, où l’on retrace le parcours de cet être exceptionnel, un peu comme dans les documentaires à sensation sur Netflix, où le dispositif repose sur l’enchâssement des différents niveaux de réalité… Plusieurs acteurs importants de sa vie, sa baby-sitter, son professeur de violon, sa voisine battue et son mari violent, son dealer d’armes… viennent témoigner et des « images d’archives » sont diffusées. Mais tout est fabriqué : les capsules vidéo du passé sont conçues en direct sur le plateau. C’est une histoire un peu biblique ou mythologique, comme on raconterait la naissance d’un pharaon ou d’un roi.Très tôt, Ralf parle comme Donald Trump. Beaucoup d’emprunts viennent d’ailleurs de ses tweets ou de choses qu’il a pu dire dans les médias.

Comment définirais-tu cette pièce ? As-tu suivi le processus de traduction ?

PAN ! est une farce. Les références sont très lisibles mais elle comporte de nombreux pièges : différentes temporalités, des impasses dans les degrés de lecture, etc. Il y a une trame narrative et puis des choses qui y échappent, un peu comme chez Spregelburd. On sent d’ailleurs des porosités entre les deux auteurs, même si Mayenburg écrit plutôt dans un paysage lié au noyau familial, avec des références qui nous sont proches, dans une sphère occidentale. Depuis L’Enfant froid, l’écriture de Mayenburg a évolué, elle s’est minée.

Il nous a expliqué qu’il s’était servi ici d’un dictionnaire d’allitérations pour écrire des passages entiers où les personnages déraillent, ce qui nous demande de prendre des libertés pour la traduction… Oui, la création du spectacle a commencé dès la traduction, quand on essaye de décrypter les moteurs de jeu des scènes… PAN ! est construit comme une sorte de mille-feuilles d’espace-sens. La dramaturgie se présente un peu comme une pièce montée. Il y a un premier cercle qui est narratif ; un deuxième qui correspond à une sorte d’espace tampon ; puis un troisième qui est celui du théâtre. Donc, au moment de la traduction, on devait déjà y voir clair dans ces sphères temporelles. C’était un travail déroutant parce que les scènes sont parfois des impasses. Plusieurs motifs avancent presque dans une logique absurde, de collages de contraires. L’enchaînement des scènes n’est pas forcément construit dans une logique de nœuds mais plutôt de rebonds. On n’arrête pas de faire des sauts entre le talkshow télévisé, les capsules du passé… et la tonalité n’est pas la même dans ces différents espaces. Joséphine, la traductrice, a été voir Marius à Berlin pour tenter d’y voir plus clair, mais ses réponses étaient souvent des pirouettes.

Tu parles d’un « espace-tampon ». À quoi correspond-il ?

C’est une zone fusible dans laquelle on tente d’accorder (ou de malmener) la narration, comme dans une improvisation qui décroche… Ce sont de petits attentats qui sont dans le texte. Certaines scènes jouent avec l’actualité immédiate, à laquelle s’ajoutent des motifs plus souterrains, plus absurdes, plus profonds, liés au terrorisme enfantin, à la manière dont un enfant impose parfois un système de réalité dans ses jeux. C’est une forme de diktat. Le fait que personne n’ose désobéir à Ralf reste un mystère. Pourquoi ils ne lui disent pas non ?

Ils semblent être pris dans une sorte de crainte presque méta-théâtrale de disparaître s’ils n’obéissent pas au jeu que Ralf impose.

Comment rends-tu ces différentes superpositions ?

J’essaie de créer un espace de collusion qui peut amener des grilles de lecture et des circulations réalistes, et en même temps des éléments illogiques qui obéissent à d’autres lois. Par exemple, il y a une entrée qui ressemble à une entrée domestique, mais qui au lieu de nous amener dans un appartement, nous amène dans un angle de fond vert, une sorte de non-lieu.

Il y a aussi un jeu avec l’accumulation de personnages. Deux des acteurs jouent beaucoup de rôles différents et les transitions sont trop courtes pour qu’ils puissent passer d’un personnage à l’autre. Donc certaines transitions se passent à vue et sont volontairement un peu ratées. Les acteurs sont constamment en catastrophe et luttent pour essayer de maintenir le spectacle à flot.

Le support vidéo est très présent dans la pièce. Que raconte-t-il ?

Tom, l’un des personnages, est une sorte de journaliste d’investigation, de conseiller de communication, de producteur de reality-show, on ne sait pas très bien…

La vidéo est dans un premier temps liée à son regard, à sa recherche de mise en scène, de sensationnel : il est une sorte de médiateur entre l’acteur et le public… avant que Ralf ne s’en accapare pour réécrire son propre mythe selon son désir, et sans metteur en scène.

Quel est l’univers scénique du spectacle ?

L’univers emprunte à la fois à l’Amérique des années 80, celle de l’ascension de Trump, et au bric-à-brac du new age contemporain. C’est d’ailleurs vers une imagerie holistique que va probablement tendre la prise de pouvoir fasciste de Ralf…

Comment s’est formée la distribution ?

Ils sont six jeunes acteurs sur scène. Nina Blanc, Emile Falk-Blin et Fabien Magry, avec qui j’ai déjà travaillé sur plusieurs spectacles et Léonard Berthet-Rivière, Pauline Desmet et Titouan Quittot, avec qui je travaille pour la première fois. Je cherche une sorte d’inadéquation entre les acteurs et les personnages. Quelque chose d’un peu « à côté de la plaque ». Il leur faut aussi une plasticité assez forte pour pouvoir passer d’un personnage à l’autre.

Un mot sur le titre de la pièce ?

Pan est la traduction française de l’onomatopée allemande Peng. C’est un accident de traduction mais la figure de Ralf comme nouveau messie paganiste n’est pas sans rappeler les premiers mouvements écologistes du début du XXème siècle en Allemagne et en Autriche, comme le « völkisch ». Ces mouvements prônaient un retour à la spiritualité païenne, un rejet de l’anthropocentrisme des religions du livre, et sont le berceau du nazisme.

Que recherche l’auteur en truffant la pièce de propos sexistes et racistes ?

En manipulant le pacte narratif du théâtre, Ralf nous prend en otage : il joue avec notre silence de spectateurs, et pour satisfaire à notre appétit de sensationnel, met en scène et joue avec les mécanismes de domination, sans que nous ne puissions vraiment agir. C’est d’une certaine manière une métaphore théâtrale de la complicité.